A quoi pourrait ressembler le futur Parlement européen ?

Si comme le prédisent les sondages, les populistes « raflent la mise », que la gauche est en perte de vitesse, que les conservateurs se maintiennent… A quoi pourrait ressembler le nouveau visage du Parlement européen ? Pour la première fois en vingt ans, les deux principaux groupes politiques pourraient ne pas disposer de la majorité à eux deux. Ce qui devrait changer le visage du nouvel hémicycle. Quels alliances pourraient intervenir pour dégager une nouvelle majorité ? Quels seront les nouveaux « faiseurs de rois »? Explications.

On connaîtra ce dimanche soir le visage des 751 députés européens, mais pas forcément l’équilibre politique du nouveau parlement. Le véritable rapport de force au sein de l’hémicycle ne se dessinera en effet qu’au bout de quelques jours, voire semaines, au terme de discussions et d’alliances. Les partis et élus de chaque pays ont jusqu’à la l’ouverture de la nouvelle session du parlement, le 2 juillet,  pour s’organiser en groupes politiques. Comme de nombreux Parlements nationaux, celui de l’UE doit faire face à l’émiettement de l’échiquier politique, l’usure des formations traditionnelles. On sait déjà que plusieurs formations seront remodelés et, que des alliances seront conclues pour dégager une majorité. Des changements majeurs sont attendus en 2019. Pour la première fois en vingt ans, les deux principaux groupes, à savoir le Parti populaire européen (PPE) et l’Alliance progressiste des socialistes & démocrates (S&D) pourraient en effet ne pas disposer de la majorité à eux deux », comme le souligne Contexte, qui propose aussi un agrégat de sondages.

Au 20 mai, en comptabilisant les intentions de vote britanniques, les derniers agrégats de sondages nationaux réalisés par Poll of Polls et par le média européen Politico donnent les chrétiens-démocrates du PPE en tête de la future assemblée (22,3 % des sièges), devant les sociaux-démocrates du S&D (environ 19,5 %), les libéraux de l’ADLE (environ 14 %), les trois groupes de la droite eurosceptique (entre 6,5 et 9,7 % chacun), les écologistes (environ 7,3 %) et la gauche radicale (environ 6,8 %). Le visage du nouvel hémicycle serait alors le suivant.

Sources: Agrégats de sondages nationaux – 20 mai 2019 (47 sièges seront désignés par des membres non membres et des membres de partis politiques nationaux entrants pour la première fois au Parlement européen, et dont nous sommes un membre du groupe parlementaire de gauche ou de droite. Ils sont ici installés au centre de l’hémicycle.)

Les euroseptiques en progression dans quatre pays

Les eurosceptiques, voire europhobes, d’extrême droite, qui ne siègent pas nécessairement ensemble au Parlement européen, devraient arriver largement en tête en Italie (31 % des voix) et au Royaume-Uni (33 %), tandis qu’ils ont pour le moment une courte longueur d’avance d’un point en Finlande (18 %) et de deux points en France (24%). Au total, ces formations pourraient concentrer plus de 179 élus sur 751, soit 23,8% de l’hémicycle. Reste à savoir s’ils seront capables de se rassembler au sein d’un seul groupe ou s’ils resteront éparpillés entre plusieurs formations. L’Italien Matteo Salvini, Marine le Pen et d’autres figures d’extrême droite ont entamé des manœuvres de rapprochement. Le premier a lancé les contours d’une formation réunissant notamment une dizaine de partis (notamment le RN français, le Vlaams Belang flamand, le parti d’extrême-droite estonien EKRE, et les vrais Finlandais). Mais cette alliance n’a pas pour l’instant de forme officielle. Les euroseptiques n’ont visiblement pour l’heure pas convaincus (notamment le PiS polonais de quitter le groupe ECR et le Fidesz hongrois d’abandonner le PPE). Les négociations vont se poursuivre après les élections, mais cette fusion semble difficile tant les positions sur certains dossiers sensibles semblent non conciliables, en particulier sur les questions migratoires et liens avec la Russie.

 Une alliance des libéraux/Démocrates qui pourrait devenir centrale

Avec le renfort éventuel d’une vingtaine d’eurodéputés étiquetés La République en marche (La REM), l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) devrait connaître une belle progression (environ 14% des sièges du Parlement, soit 105 sièges). Le groupe, de centre-droit, a ainsi annoncé sa dissolution en vue d’une prochaine recomposition, notamment autour des futurs eurodéputés de La REM (crédité d’environ 22 élus). Ce nouveau groupe pèserait une centaine d’eurodéputés, davantage s’ils arrivent à convaincre des élus du Parti populaire européen (PEE). « Nous allons fonder un nouveau groupe au Parlement européen qui sera central, progressiste et démocrate » a ainsi indiqué le 22 mai Nathalie Loiseau. Mais la tête de liste de La REM s’est gardée de faire référence à l’ADLE,  qui constituera pourtant le noyau dur de cette future force politique.

Les écologistes au point mort

Pour les Verts, et alors que l’écologie a été au cœur de la campagne des Européennes, les résultats du scrutin devraient s’apparenter au mieux à une stagnation. Dans un Parlement sans les Britanniques, leur groupe ne gagnerait pas d’élus, tandis qu’il se renforcerait légèrement dans un premier temps dans un hémicycle comptant les futurs députés élus par le Royaume-Uni. En effet, malgré des intentions de vote en hausse en Allemagne, en Lituanie et en Belgique et en France (où les Verts français pourrait passer de six à sept élus), le groupe des Verts/Alliance libre européenne (Verts/ALE) parviendrait à peine à dépasser la barre des 7% des sièges à Bruxelles (environ 55 sièges). En importance numérique, ce groupe ne devrait être que le sixième groupe au Parlement Européen, sauf alliance avec les libéraux (voir ci-après).

Les conservateurs en tête, mais avec un problème de majorité

Les partis de droite ont de fortes chances d’arriver en tête du scrutin européen. L’avance des formations conservatrices paraît en effet suffisamment importante pour ne pouvoir être rattrapée par leurs adversaires dans un certain nombre de pays. C’est notamment le cas, en Allemagne (29 % des voix), en Croatie (30 %), en Grèce (35 %), ou encore en Irlande (35 %). Le Parti populaire européen (PPE), groupe de droite devrait ainsi garder le groupe le plus fourni. Selon les différents sondages, il perdrait une quarantaine de sièges et obtiendrait autour de 170 députés, dont 11 membres de la liste française Les Républicains. Soit, très loin de représenter la majorité des 751 élus. Jusqu’ici, aucun groupe n’a jamais réussi à obtenir une majorité à lui tout seul. Le PPE va donc devoir chercher à créer une coalition avec deux ou trois camps.

Une alliance avec le groupe de gauche « Alliance progressiste des socialistes et démocrates » (S&D) pourrait être tentée.  Avec 186 sièges, ce groupe constitue actuellement le deuxième plus gros contingent d’eurodéputés et il devrait le rester. Malgré une chute, il devrait réaliser un score d’environ 19,5 %,(contre 25% aujourd’hui). Ce qui lui donnerait au moins 146 sièges (dont seulement quatre pour les socialistes français), Reste qu’une telle coalition ne permettrait probablement pas à elle seule d’atteindre la majorité absolue. Il faudra donc pour le PPE, trouver un troisième allié. Ce dernier pourrait être recherché du côté des libéraux du groupe ADLE qui après sa dissolution entend entamer une recomposition. Une alliance pourrait être aussi envisagée avec les Verts. Un accord avec l’extrême gauche semble en revanche improbable. Le groupe GUE/NGL (Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique), qui accueille la France Insoumise, devrait passer sous les 50 sièges.

Le Parlement européen a lui aussi réalisé ses propres estimations sur la base des sondages nationaux. Ses dernières prévisions au 18 avril, date à laquelle le Royaume-Uni a confirmé sa participation au scrutin, étaient les suivantes.

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