Pour ce dernier acte avant la commémoration du centenaire de l’armistice, Emmanuel Macron a choisi de densifier les cérémonies de ce 11 Novembre en les organisant sur deux jours. Le chef de l’Etat y est apparu comme s’inscrivant dans la continuité de ces prédécesseurs, tout en revendiquant l’inscription dans « une longue histoire ».
A l’évidence et assez curieusement, Emmanuel Macron a compris que dans un pays où l’histoire est une sorte de passion française, la mémoire collective est en quelque sorte une prérogative de la présidence. Pour sa première commémoration du 11 Novembre en tant que chef de l’État, il n’a d’ailleurs pas hésité à cumuler les symboles au cours de ces deux jours de commémoration de la grande guerre.
Vendredi 10 novembre
Le président de la République a accueilli, vendredi à Paris, son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier. Les deux chefs d’état ont insisté vendredi sur l’urgence à « refonder » l’Europe » dès qu’un nouveau gouvernement sera en place à Berlin. »Nous partageons l’un et l’autre le sentiment profond que cette refondation est nécessaire et urgente et que l’année qui s’ouvre est absolument déterminante à cet égard« , a déclaré Emmanuel Macron à l’issue de son entretien à l’Elysée avec le président allemand. « C’est notre responsabilité commune, une fois que le gouvernement de coalition sera établi, d’œuvrer en cela. C’est le travail que je compte conduire avec la chancelière Merkel« , a t-il précisé.
Avec Frank-Walter Steinmeier, Président allemand pour regarder le passé et construire l'avenir, 100 ans après la Première guerre mondiale. pic.twitter.com/k6lKdDWmmV
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 10, 2017
De son côté, le président Steinmeier a salué le discours « courageux « d’Emmanuel Macron le 26 septembre à La Sorbonne, qui a tracé une série de pistes de réforme de l’Europe « à un moment où il y avait beaucoup de scepticisme« . « Je suis sûr que cet élan donné par le discours de La Sorbonne portera le futur gouvernement allemand« , a déclaré le président allemand.
Les deux chefs d’Etat ont ensuite rejoint ensemble l’Alsace où ils ont inauguré dans l’après-midi l’Historial franco-allemand du Hartmannswillerkopf (Haut-Rhin). Accroché à la « Montagne mangeuse d’hommes« , son surnom dès 1918, ce mémorial niché sur le versant alsacien des Vosges est situé sur l’un des sites les plus sanglants de la première guerre mondiale. Entre 20.000 et 30.000 soldats français et allemands y ont perdu la vie.
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C’est sous une pluie fine et un froid à pierre fendre, que les deux chefs d’état se sont présentés à l’entrée de la tranchée d’honneur au sommet du Hartmannswillerkopf. D’un pas lent, ils ont ensuite pénétré côte à côte dans la crypte, où ils ont signé le livre d’or. Placée sous le signe de la transmission de la mémoire à la jeunesse, la cérémonie s’est poursuivi dans la nécropole du Hartmannswillerkopf où les deux présidents sont allés à la rencontre de lycéens français et allemands, avant de visiter le champ de bataille.
« Ici, à Hartmannswillerkopf, nous venons goûter l’amertume des combats qui furent livrés », a indiqué en préambule Emmanuel Macron.
Ici, à Hartmannswillerkopf, nous venons goûter l'amertume des combats qui furent livrés. pic.twitter.com/yb4vl6Knt3
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Le président de la République a ensuite appelé les deux pays à écrire une « histoire commune ». « Ce déplacement conjoint et ce geste, ce n’est pas revenir sur un passé douloureux pour nos deux pays, c’est exercer ensemble le devoir de mémoire et le devoir d’histoire qui seul permet de ne pas faire bégayer celle-ci », a déclaré Emmanuel Macron. « Ce que nous faisons aujourd’hui […] c’est de construire une histoire en commun parce qu’elle est le socle d’un avenir en commun, parce que nous avons beaucoup à faire ensemble« .
« Si nous devons aujourd’hui refonder notre Europe, (…) c’est pour ne rien oublier de nos cicatrices en commun, de notre mémoire partagée, c’est pour vouloir refonder autour d’une souveraineté commune » en Europe. « Cette souveraineté commune, c’est celle d’une Europe qui protège nos concitoyens, plutôt que d’une Europe qui se divise dans ses guerres intestines », a ajouté le président français. « La vocation de l’Europe c’est de construire la paix« , a-t-il encore glissé, en réponse à des lycéens français et allemands qui l’interrogeaient, avant la cérémonie, sur la nécessité d’investir dans la Défense. Un discours qui faisait écho aux propos de Frank-Walter Steinmeier, qui un peu plus tôt avait défendu l’idée de la souveraineté européenne et dénoncé les nationalismes : « Ce n’est pas la montagne qui mange les hommes, c’est le nationalisme qui mange les hommes. «
Samedi 11 novembre
Pour sa première commémoration du 11-novembre, Emmanuel Macron souhaitait célébrer le centenaire de l’arrivée au gouvernement de Georges Clemenceau en pleine Première Guerre mondiale. Il a donc commencé par visiter, ce samedi matin, le musée consacré à l’ancien président du Conseil dans le 16e arrondissement. Puis, il a déposé une gerbe devant la statue du ‘Père la Victoire’.
Dans le bureau de Georges Clemenceau, une pièce qui porte une part de notre histoire. Nous nous souvenons aujourd'hui d'un dirigeant qui a su rassembler et donner à ses hommes le sursaut patriote pour défendre notre nation. pic.twitter.com/0A1oZoo7BT
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 11, 2017
Comme le veut la tradition, le président de la République a ensuite remonté les Champs-Elysées à pied, avant de passer en revue les troupes et de se recueillir sur la tombe du Soldat inconnu, sous l’Arc de triomphe.
Notre chant patriote.
La Marseillaise a porté les soldats de la Première Guerre mondiale.
Il est le lien qui unit tous les Français à travers le temps. pic.twitter.com/XzAkp9l3Bz— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 11, 2017
Le Président a appelé à se souvenir du 11 novembre lors des commémorations, mais « aussi au quotidien », invitant notamment à associer celles et ceux qui « risquent leur vie pour préserver la nôtre » sur les théâtres d’opération, en Syrie ou en Irak et « pour ce qui concerne la France, au sol du Sahel ». Il a aussi fait un plaidoyer pro-européen en affirmant « qu’aimer la paix, c’est croire à l’Europe« . « Ses peuples, ses cultures, sa diversité bien sûr (…) Mais c’est aussi aimer et croire à l’Europe politique, celle des libertés, celle de la citoyenneté commune. C’est l’aimer même avec ses imperfections (…) ses insuffisances. Même avec sa complexité et avec ses lenteurs ».