Contrôle des chômeurs : des sanctions plus lourdes que prévu

C’en est bien fini du droit à l’erreur pour les demandeurs d’emploi. Un décret réformant le contrôle des chômeurs, publié dimanche 30 décembre au Journal Officiel, durcit l’échelle des sanctions initialement annoncée par le gouvernement. Radiation, allocations supprimées, renforcement des pouvoirs de Pôle Emploi… Ce que prévoit le texte.

Lors de ses vœux de fin d’année aux Français, Emmanuel Macron avait clairement annoncé la couleur pour les demandeurs d’emplois : « Le gouvernement dans les prochains mois devra poursuivre ce travail pour changer en profondeur les règles de l’indemnisation du chômage afin d’inciter davantage à reprendre le travail ». Un changement déjà amorcé la veille avec la publication, dimanche 30 décembre, d’un décret relatif aux droits et obligations des demandeurs d’emploi. Ce volet de la réforme « avenir professionnel » qui porte notamment sur la révision de l’échelle des sanctions avait été adopté dans son principe cet été par le Parlement, après avoir été annoncé par le ministère du Travail en mars dernier. Reste que la version finale paru ce dimanche au JO, n’est pas tout à fait conforme aux pistes présentées au printemps 2018.

Un mois de radiation en cas de rendez-vous raté

L’absence à un rendez-vous de Pôle emploi entraînait jusqu’à présent une radiation de deux mois des listes de demandeurs d’emploi. Dans la première version du texte envisagé par l’exécutif, il était prévu de ne plus sanctionner ce manquement que de 15 jours de radiation. Au final, ce sera un mois. Cette durée sera portée selon le décret, à deux mois au bout de deux manquements et quatre mois au troisième manquement constaté.

Un durcissement des sanctions en cas de manquement aux obligations de recherche d’emploi

S’agissant des sanctions concernant l’insuffisance de recherche d’emploi, le gouvernement avait évoqué des sanctions graduelles : suspension de l’allocation d’un mois la première fois, de deux mois la deuxième fois et quatre mois en cas de troisième manquement. Selon le décret, l’allocation sera désormais purement et simplement supprimée, et non plus suspendue, dès le premier manquement à la recherche d’emploi. Concrètement, le fait pour le demandeur d’emploi ne pas « justifier d’actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi » ou de « refuser à deux reprises une offre raisonnable d’emploi », entraînera la fin des droits à chômage.

A noter à ce titre que lecture du décret permet de découvrir que la notion de « salaire antérieurement perçu » ne sera plus prise en compte pour déterminer ce qu’est une « offre raisonnable d’emploi ». Le texte abroge en effet « la définition du salaire antérieurement perçu qui était pris en compte pour déterminer l’offre raisonnable d’emploi ». Le demandeur d’emploi ne pourra ainsi plus plus rejeter une offre au motif que le salaire est bien inférieur à ce qu’il touchait au titre de son dernier emploi. Le contrôle de la recherche d’emploi se fera via un « journal de bord numérique » qui devra être mis à jour tous les mois par le chômeur, pour prouver qu’il est actif. Ce « journal » sera expérimenté pendant un an dans deux ou trois régions, à partir de mi-2019.

Un durcissement des sanctions pleinement assumé ce mercredi par la porte-parole des députés La REM, Aurore Bergé, au nom d’une « logique de justice« . « A partir du moment où vous ne venez pas à votre rendez-vous avec Pôle emploi et donc que vous n’êtes pas dans une recherche active d’emploi et que vous ne respectez pas quelque part le contrat que vous passez avec la société, avec les Français, c’est logique qu’il puisse y avoir des sanctions », a-t-elle estimé sur Cnews. « Les sanctions beaucoup plus dures, ça doit s’accompagner de propositions d’emplois plus importantes et d’accompagnement plus importantes« , a plaidé pour sa part le député La REM, Aurélien Taché, co-rapporteur de la loi « avenir professionnel », sur France Inter. « 

Une pilule qui a en revanche du « mal a passer  » auprès des syndicats qui dénoncent les risques et la fragilité de ce nouveau dispositif. Selon eux, d’après une étude de Pôle emploi publiée fin août, seuls 12% des demandeurs d’emploi ne cherchent pas activement un emploi, et ce taux chute même à 8% chez les bénéficiaires de l’assurance-chômage, c’est-à-dire ceux qui perçoivent des allocations chômage. Michel Beaugas, secrétaire confédéral du syndicat Force Ouvrière a ainsi dénoncé sur France Info, une « précarisation rampante des chômeurs ». Pour Denis Gravouil de la CGT, « On prend les chômeurs pour des fraudeurs« . « Ce système va pousser les gens à prendre les petits boulots dégradés », ajoute t-il.

Le contrôle et les sanctions dévolus uniquement à Pôle Emploi

L’autre volet de ce décret est structurel. Il confère à Pôle Emploi tous pouvoirs, sur le contrôle et la sanction des chômeurs. Rappelons qu’auparavant, le service public de l’emploi pouvait sanctionner les absences aux convocations par une suspension de l’indemnisation, mais le contrôle de la recherche effective d’emploi et sa sanction étaient légalement du ressort de la direction régionale du ministère du Travail.

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