Au terme de deux ans de travail, Myriam El Khomri, a présenté lundi 7 novembre aux partenaires sociaux, la version finale de son guide « du fait religieux en entreprise ». Un document sous forme de questions-réponses qui vise à apporter des réponses concrètes tant aux employeurs, qu’aux salariés. Revue de détail.
Né, dans le contexte « post attentat », ce guide tente de répondre aux demandes croissantes des chefs d’entreprise, des organisations syndicales, patronales, et des DRH, qui ont parfois l’impression de ne pas disposer des outils nécessaires pour faire face aux demandes des salariés. Un sentiment confirmé par une étude de l’institut Randstad publiée au mois de septembre, selon laquelle près d’un manager sur deux (48%) est confronté à la question de l’expression des convictions religieuses au travail, voire « débordés », pour 18% des dirigeants interrogés.
Un guide sous forme de vade–mecum
Ce n’est pas un document créant des règles nouvelles, que propose là la ministre du travail, mais bien un vade-mecum à l’usage des employeurs comme des salariés. Organisé sous forme de questions/réponses, il tente d’apporter des réponses concrètes aux questions que peut susciter le fait religieux en entreprise.
Le guide, qui en préambule, précise des notions clés telles que la liberté de religion, la laïcité ou le principe de non discrimination…, les illustre dans une seconde partie par des situations concrètes. Pour chacune des questions traitées, des réponses distinctes sont apportées au lecteur, selon qu’il est employeur ou salarié.
Cinq grandes thématiques de la vie de l’entreprise sont successivement abordées : l’offre d’emploi et l’entretien d’embauche, l’exécution du travail, le comportement dans l’entreprise, l’organisation du temps de travail, et la vie collective.
Pour chacune de celles-ci, des cas pratiques sont posés. Trente neuf au total, qui viennent clarifier le cadre juridique pour l’employeur, comme pour le salarié. Elles concernent aussi bien le comportement dans l’entreprise, les congés, les fêtes religieuses, l’organisation du temps de travail, la vie collective, la pratique d’un jeûne religieux, les signes religieux ou encore, la mise à disposition de salles de prière etc.
Au sein de chaque thème, les questions/réponses sont illustrées par des situations concrètes, au regard de la diversité des pratiques religieuses.
Des cas très précis y sont abordées : par exemple : puis-je demander à un(e) candidat(e) si sa pratique religieuse fait obstacle à sa présence à certains moments de la semaine ou de l’année ou à l’exécution de certaines tâches ? Puis-je sanctionner un(e) salarié(e) qui s’absente sans autorisation pour célébrer une fête religieuse ? Puis-je prévoir dans le règlement intérieur l’interdiction de porter des tenues ou symboles religieux comme un voile islamique, une kippa ou un turban sikh ? Un(e) salarié(e) fait du prosélytisme. Puis-je lui interdire ? Le sanctionner ? Ou encore, Plusieurs salariés demandent la mise à disposition d’une salle pour pouvoir prier. Suis-je tenu de leur accorder ? etc.
Un guide sans valeur normative
Le guide du fait religieux en entreprise élaboré avec l’appui des partenaires sociaux et des représentants des différents cultes, n’a en lui-même pas de valeur juridique normative, opposable. On l’a dit, loin de créer de nouvelles normes, il constitue une simple base documentaire regroupant les règles nationales et européennes existantes et la jurisprudence.
A noter que ce document intègre la dernière réforme issue de l’article 2 de la loi travail, qui permet, sous certaines conditions aux entreprises, d’inscrire le principe de neutralité dans le règlement intérieur. A la question « Suis-je tenu de prévoir une disposition imposant la neutralité religieuse des salariés dans le règlement intérieur de mon entreprise ? », le guide répond par la négative : « La neutralité religieuse qui s’impose aux agents publics ne s’applique pas aux salariés des entreprises privées qui ne gèrent pas un service public ». Reste qu’il est possible sous certaines conditions encadrées par la loi, introduire des restrictions dans le règlement intérieur.
La version ultime finalisée de ce guide doit en principe être mis sans délai sur le site internet du ministère du travail. Comme l’a souligné Myriam El Khomri, il n’est toutefois pas prévu à ce stade de le distribuer à toutes les entreprises. « L’idée, c’est qu’il y ait suffisamment de médiatisation pour que les gens sachent qu’il existe, et que les organisations syndicales et patronales puissent s’en faire le relais au sein des entreprises. », a indiqué la ministre du travail.
Guide pratique du fait religieux dans les entreprises privées
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