Le gouvernement dévoile sa réforme des institutions

Le Premier ministre, Edouard Philippe, a dévoilé ce mercredi les grandes lignes de la réforme des institutions. Baisse du nombre de parlementaires, proportionnelle aux législatives, fin du cumul des mandats… Ce qu’il faut retenir des annonces du gouvernement.

Jusqu’au dernier moment, les discussions se sont poursuivies côté exécutif comme chez Les Républicains. Le suspense a pris fin ce mercredi vers 16 heures. Après présentation dans la matinée de la réforme des institutions en conseil des ministres, le chef du gouvernement a levé le voile sur la révision constitutionnelle voulue par le président Emmanuel Macron. « Il ne s’agit ni de revenir à la IVe République, ni de passer à la VIe, mais de repasser aux sources de la Ve République » a déclaré le Premier ministre avant de détailler les grandes lignes de la réforme à la presse.

Une réforme, trois textes

La réforme des institutions comprendra trois volets :

  • un projet de loi ordinaire. Il fixera la dose de proportionnelle et l’habilitation à établir une nouvelle carte électorale (passage de 577 à environ 340 circonscriptions) ;
  • un projet de loi organique qui entérinera la baisse de 30% du nombre de parlementaires et le non-cumul dans le temps ;
  • la révision constitutionnelle. Elle actera la réforme du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), la suppression de la Cour de justice dans la Constitution, la réforme du Conseil Economique et Social (CESE), mentionnera dans la Constitution la Corse dans un article spécifique et y inscrira »l’impératif de lutte contre le réchauffement climatique ».

Ces trois textes seront déposés dans les jours prochains devant le Conseil d’Etat, qui les évaluera et demandera le cas échéant des corrections.  La réforme dans son ensemble sera présenté en conseil des ministres le mercredi 9 mai, pour une première lecture. « l’objectif du gouvernement est de permettre à l’Assemblée nationale de procéder à une première lecture de ces textes avant la pause estivale », soit le calendrier prévu, « puis de parachever cette réforme en 2019 », a indiqué Edouard Philippe.

Les mesures annoncées

Une baisse de 30% du nombre de parlementaires

Le candidat Macron avait promis une baisse « d’environ un tiers » du nombre de parlementaires.  Le Premier ministre a confirmé ce mercredi que cette baisse serait de l’ordre de 30% « dans des conditions qui garantissent la représentation de tous les départements et les territoires ». D’après ces arbitrages, le nombre de sénateurs et de députés serait ramené à 244 pour les premiers et 400 pour les seconds (contre 348 et 577 aujourd’hui), dont 60 élus à la proportionnelle.

L’introduction d’une dose de proportionnelle aux législatives

Il s’agissait là de la principale question restée en suspens. Promise par le chef de l’Etat en juillet, devant le Congrès, la mesure vise à ce que « toutes les sensibilités soient justement représentées à l’Assemblée. Restait à s’entendre sur la dose de proportionnelle aux élections législatives. Elle concernera au final  « 15% des sièges de députés à pourvoir ». 61 députés sur 404 seront ainsi élus à la proportionnelle lors des prochaines élections en 2022. Un chiffre nettement inférieur à celui demandé par le MoDem, principal allié de la République en Marche, qui plaidait pour une dose de 25%. François Bayrou, son président, a d’ailleurs affirmé dans la foulée de l’allocution d’Edouard Philippe que cette réforme est « un point de départ » et qu’il y a « des choses à améliorer ».

Trois mandats maximums dans le temps

Autre mesure phare de cette réforme constitutionnelle : l’interdiction du cumul des mandats dans le temps « au-delà de trois mandats identiques, complets et consécutifs pour les parlementaires, les présidents d’exécutifs locaux ». Cette mesure non rétroactive, applicable aux mandats en cours, ne concernera pas les maires des communes de moins de 9.000 habitants. Envisagé à l’origine pour les communes de 3.500 habitants, ce seuil a été relevé afin de ménager les plus petites d’entre elles. En faisant cette exception pour les maires des petites villes, le gouvernement fait un geste envers le Sénat et son président, Gérard Larcher, opposé depuis le départ à toute interdiction du cumul des mandats dans le temps.

Le travail parlementaire révisé

Afin de gagner en efficacité, le gouvernement a souhaité profiter de cette réforme pour revoir le travail parlementaire. L’idée étant de gagner du temps dans la procédure. Ainsi, « le vote du Budget sera plus rapide », 50 jours au lieu de 70, mais « un temps plus long » sera consacré à l’évaluation des politiques publiques, a assuré Edouard Philippe. « Les textes les plus urgents pourront bénéficier d’une inscription prioritaire à l’ordre du jour« , a fait savoir le Premier ministre. « Sur le modèle du Sénat, la discussion en séance pourra être focalisée sur les points principaux« , a-t-il confirmé.

En revanche, l’exécutif a reculé sur sa volonté de limiter le nombre d’amendements par groupe parlementaire. Une mesure qui avait suscité nombre de critiques, y compris au sein de la majorité. « La limitation des amendements en fonction de la taille des groupes parlementaires a donc été retirée de la réforme des institutions.  » Le gouvernement a pris en compte l’opposition formulée par les présidents de groupes parlementaires à l’idée d’un contingentement des amendements. Cette disposition, qui avait été envisagée, a donc été retirée », a annoncé le chef du gouvernement, précisant toutefois qu’une limitation des amendements « sans portée normative » serait engagée.

Des institutions touchées par la réforme

La réforme constitutionnelle s’attardera également à redéfinir le rôle de plusieurs institutions. Le Premier ministre a indiqué qu’elle actera ainsi la suppression de la Cour de justice de la République (CJR). La procédure de mise en cause de la responsabilité pénale des ministres pour les faits commis dans l’exercice de leurs fonctions « sera désormais du ressort de la cour d’appel de Paris », a t-il annoncé. Ajoutant qu’un’« filtre sera toutefois conservé pour que la responsabilité pénale des ministres ne soit engagée qu’à bon escient », sans livrer davantage de détails dans l’immédiat. La réforme mettra également « fin à la présence de droit des anciens Présidents de la République au Conseil constitutionnel« .

Le projet prévoit également une « transformation profonde du Conseil économique, social et environnemental (CESE)« , qui deviendra « la chambre de la société civile, chargée d’organiser les consultations des citoyens et des experts sur les projets d’avenir de notre pays« , a fait valoir Edouard Philippe. Ses membres seront en revanche « réduits de moitié« . Enfin le Conseil de la magistrature (CSM) verra ses pouvoirs renforcés. Il s’agit a précisé le chef du gouvernement, de garantir l’indépendance statutaire des magistrats du Parquet en prévoyant qu’ils soient nommés sur avis conforme du CSM.

Une référence explicite à la Corse dans la Constitution

« Conformément aux engagements du président de la République, a annonce Edouard Philippe, la Corse trouvera sa place dans notre Constitution ». « Ce qui permettra d’adapter les lois de la République aux spécificités insulaires, mais sous le contrôle du Parlement », a t-il ajouté. Il s’agissait là, d’une des rares revendications nationalistes retenues par Emmanuel Macron lors de sa visite en Corse début février.

L’impératif de lutte contre le changement climatique », sera également inscrit dans la Constitution suite à cette réforme. Cette mention symbolique figurera dans l’article 34 qui définit les missions du législateur. « Le gouvernement prendra ainsi sa part dans ce défi majeur du siècle« , a fait savoir Edouard Philippe. Le gouvernement renvoie en revanche à plus tard, l’introduction dans ce texte fondateur du « service national universel ». Ce sera au Conseil d’Etat de trancher cette question.

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