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Une entreprise condamnée peut se retourner contre l’État pour obtenir le remboursement d’une partie des dommages et intérêts versés à un salarié victime d’une maladie professionnelle liée à l’amiante. Deux décisions récentes fixent les contours et limites de cette coresponsabilité.
La nouvelle a fait l’effet d’une bombe : l’État peut être jugé coresponsable d’une maladie ou d’un accident professionnel d’un salarié au côté de son employeur qui, a bon droit, peut obtenir le remboursement d’une partie des dommages et intérêts qu’il a dû verser.
C’est en substance la position adoptée par le Conseil d’Etat dans deux décisions rendues le 9 novembre dernier. La haute juridiction administrative y admet pour la première fois que même s’il est condamné pour faute inexcusable, l’employeur peut se retourner contre l’administration qui a commis une faute participant au préjudice direct de la victime.
La première de ces décisions a le mérite de préciser le cadre juridique de ce principe de coresponsabilité et de fixer les limites du partage de la réparation entre l’employeur et l’État. La seconde illustre de manière très concrète les conséquences de la position de la plus haute autorité administrative dans un cas de maladie professionnelle liées à l’amiante.
Le Conseil d’Etat chargé de répartir la réparation du dommage entre la société employeur et l’État, distingue deux périodes : avant et après 1977.
S’agissant de la première, il estime que la faute des pouvoirs publics à ne pas prendre de mesures propres à limiter les dangers de l’amiante et la faute de la société à protéger ses salariés ont toutes deux concouru au développement de ces maladies professionnelles. Il en déduit que la réparation du dommage doit être partagée : à hauteur de deux tiers pour la société et d’un tiers pour l’État.
Concernant la période postérieure à 1977, le Conseil d’État relève que les évolutions réglementaires ont été de nature à réduire les risques de maladies professionnelle, alors que la société n’a pas respecté la réglementation sur cette période. Il estime, dans ces conditions, qu’à défaut pour l’entreprise de démontrer que les maladies professionnelles développées par les salariés après 1977 trouvent directement leur cause dans une carence fautive de l’État, la responsabilité de celui-ci ne peut pas être mise en cause pour cette période.