Le gouvernement va devoir affronter ce mardi deux motions de censure déposées par les groupes parlementaires d’opposition de droite et de gauche, en réaction à la gestion par l’exécutif de l’affaire Benalla. Si sur le papier cette procédure est l’arme parlementaire par excellence pour « faire tomber » le gouvernement, elle n’a été couronnée qu’une seule fois dans l’histoire de la Vème République. Comment est-elle déposée ? Quels sont les règles fixées ? A t-elle des chances d’aboutir ?… On vous explique tout.
Les députés Les Républicains ont été les premiers à dégainer en annonçant le dépôt de leur propre motion mardi 24 juillet, avant de la déposer deux jours plus tard. Ils ont ensuite été rejoints par les députés de gauche, rassemblés dans une motion commune. Fait rarissime dans l’histoire de la Ve République, Édouard Philippe affrontera donc ce mardi dans l’hémicycle deux motions de censure contre son gouvernement.
Le dépôt d’une motion de censure peut intervenir en réaction à l’engagement de la responsabilité du gouvernement sur un texte : c’est le fameux article 49-3 utilisée dans le cadre de la loi El Khomri. Mais ce mécanisme peut aussi être initiée de manière spontanée par les députés, pour censurer la politique d’un gouvernement. C’est dans ce cadre que s’inscrivent les motions de censure déposées respectivement par le chef de fil des députés Républicains (LR), Christian Jacob et les trois groupes de gauche (PS, le PCF et LFI). Une procédure qui est gérée par l’article 49. 2 de la Constitution qui stipule : « l’Assemblée nationale met en cause la responsabilité du gouvernement par le vote d’une motion de censure ».
Quelles modalités ?
Le dépôt d’une motion de censure contre le gouvernement nécessite la signature d’un dixième des députés de l’Assemblée nationale, soit 58 sur les 577 députés qui composent aujourd’hui l’Hémicycle. Un pari gagné dès le départ pour le groupe LR, qui compte à lui seul 103 membres. En revanche, les Insoumis qui avaient été les premiers, il y a huit jours, à proposer le dépôt d’une telle mention ont du se résoudre à faire front commun avec la Nouvelle Gauche (PS) et les communistes, pour parvenir à leurs fins. A lui seul, le groupe la France Insoumise qui compte 17 membres, ne pouvant déposer sa propre motion de censure.
Une fois déposée, la motion de censure « spontanée » doit être examinée dans un délai de quarante-huit heures. Sa discussion en séance publique à l’Assemblée devant intervenir entre le troisième et le cinquième jour.Déposé les 26 et 27 juillet, le texte respectif du groupe LR et du « front de gauche » sera ainsi débattu mardi 31 juillet, à 15 heures. Ces deux textes se traduiront bien par deux votes, mais ils ne donneront lieu qu’à un seul débat. Chacun sera donc soumis au vote des 577 députés. Seuls seront décomptés les votes favorables à la motion.
Le gouvernement Philippe risque t-il de tomber ?
Pour cela, le texte de chacune des deux motions doit obtenir l’adhésion de 289 députés, c’est-à-dire de la majorité absolue. Compte tenu de la composition de l’Assemblée nationale, les chances que ces deux motions parviennent à renverser le gouvernement actuel sont donc quasi nulles. Le groupe la République En Marche (La REM) compte en effet à lui seul déjà seule 312 élus sur 577, sans compter ses alliés de la majorité, les députés Modem et les élus Union des démocrates et indépendants (UDI) et Républicains constructifs. Avant même le dépôt officiel de la motion de son groupe, Christian Jacob l’a d’ailleurs reconnu. Pour l’opposition de droite comme de gauche, l’objectif est avant tout de se faire entendre.
Grâce à cette procédure, le groupe LR comme les groupes de gauche s’assurent un long débat avec le chef du gouvernement Édouard Philippe, au-delà d’une simple séance de questions au gouvernement. Utilisée plus de cent fois dans l’histoire de la Ve République, cette procédure n’a d’ailleurs entraîné la chute d’un gouvernement qu’une seule fois. En 1962, la motion de censure des opposants au projet d’élection du président de la République au suffrage universel est déposée par le centre, les socialistes et la droite non gaulliste. Elle est adoptée à 4H40 du matin par 280 députés sur 480, poussant le gouvernement de Georges Pompidou à la démission.