« La réforme du droit du travail, je la ferai par ordonnances « , avait prévenu le candidat Emmanuel Macron en avril 2017. Une procédure courante sous la cinquième république qui permet avant tout à l’exécutif d’éviter de longs débats au Parlement. A quelles conditions ? Explications.
Une procédure courante
Sur le principe, cette procédure prévue par la Constitution de 1958 (art. 38) a avant tout le mérite de permettre au pouvoir exécutif de légiférer rapidement. Le but est de gagner du temps en contournant les débats et les navettes entre les deux chambres parlementaires, qui peuvent durer des mois sur un sujet aussi sensible que la réforme du Code du travail.
Bien que très décriées, les ordonnances ne constituent pas une nouveauté. La plupart des gouvernements de la Ve République y ont eu recours, à commencer par le général de Gaulle en 1960 pour maintenir l’ordre en Algérie. Début 1982, François Mitterrand s’en est servi pour instituer le passage à la semaine de 39 heures et l’instauration de la cinquième semaine de congés payés En août 1993, durant la deuxième cohabitation, Édouard Balladur a utilisé cette procédure pour réformer les retraites et Alain Juppé en 1996 pour sa réforme de la Sécurité sociale.
Plus récemment, Nicolas Sarkozy et François Hollande y ont tous les deux recours. Nombre d’ordonnances servent aussi à transposer des directives européennes. Légiférer par ce biais est ainsi devenu banal : de 2004 à 2013, près de 400 textes de cette nature ont été publiés au Journal officiel selon un rapport du Sénat.
Une ratification dans les temps
A ce jour, députés et sénateurs ont seulement donné un « feu vert » au gouvernement » pour réformer le Code du travail par ordonnances, en adoptant le 2 août dernier, la loi d’habilitation. Ce texte ne constitue pas un « blanc seing » donné à l’exécutif. Il se contente de définir le cadre et la période de recours aux ordonnances. Selon le calendrier communiqué par le ministère du travail, le contenu de ces textes sera dévoilé officiellement jeudi 31 août. Les ordonnances seront alors adoptées en conseil des ministres dans la semaine du 18 septembre, après l’avis consultatif du Conseil d’état, avant d’être signées par le président de la République.
Une fois publiées au Journal Officiel les ordonnances deviendront applicables mais n’auront pas force de loi. Un projet de loi de ratification devra pour cela être déposé en temps et en heure devant le Parlement. Ce délai de ratification est très important. D’abord parce que le Parlement perd sa compétence dans les domaines définis par le projet d’habilitation. En effet, il peut approuver ou rejeter les ordonnances mais en aucun cas les amender. Ensuite, si le projet de loi de ratification n’est pas soumis au Parlement dans les délais prévus, les ordonnance deviendront caduques.
Il peut arriver que les parlementaires ne ratifient pas une ordonnance. Dans ce cas, elle continue d’exister, mais reste un décret dont la valeur est inférieure à la loi. En pratique, l’Assemblée peut alors, même une fois l’ordonnance signée et ses mesures appliquées, en annuler les effets.