Déserts médicaux : reprise de l’examen de la proposition de loi

L’examen de la proposition de loi transpartisane visant à lutter contre les déserts médicaux, reprend cette semaine à l’Assemblée nationale. Les inconnues sont nombreuses autour des suites d’un texte, pour le moins “inflammable“.

C’est une mesure pour le moins clivante qui fait son retour dans l’hémicycle cette semaine. Interrompu en raison de l’encombrement du calendrier législatif, l’examen de la proposition de loi transpartisane visant à lutter contre les déserts médicaux, est de nouveau au menu de l’Assemblée nationale. Le texte doit être examiné en séance publique à partir du mardi 6 mai.

Un vote acquis en faveur d’une régulation des médecins

La disposition phare de ce texte  (article 1), qui prévoit une contrainte à l’installation des médecins, a déjà été adopté, dans la nuit du 2 au 3 avril avril par les députés, par 155 voix contre 85, et ce, malgré l’avis défavorable du gouvernement. Un coup de tonnerre pour la profession. La mesure est décrite par l’exposé des motifs du texte, porté par le député socialiste de la Mayenne, Guillaume Garot, comme “un premier pas dans la régulation de l’installation des médecins sur le territoire, qui permettra, à tout le moins, de stopper la progression des inégalités entre territoires“. La proposition de loi précise que cette mesure “vise à orienter l’installation des professionnels de santé vers les zones où l’offre est la moins dense par un aménagement du principe de liberté d’installation, qui continue de prévaloir“.

Une régulation non coercitive

Signé par plus de 250 députés, le texte prévoit de créer une autorisation d’installation délivrée par les agences régionales de santé (ARS) pour les médecins généralistes, spécialistes, libéraux et salariés. La disposition, supprimée lors de son examen par la commission des affaires sociales en mars dernier, a été rétablie à l’issue du débat dans l’hémicycle du Palais-Bourbon. Mais cette “régulation, ce n’est pas la coercition“, a affirmé le rapporteur du texte.

Comment fonctionnera t-elle ? Concrètement, le dispositif prévoit que l’installation d’un médecin sera soumise à “autorisation préalable de l’agence régionale de santé compétente“, après un avis rendu par le conseil départemental de l’ordre dont il relève. L’autorisation sera délivrée “de droit“ dans les zones où l’offre de soins est insuffisante. Dans celles où sont installés suffisamment de médecins, la nouvelle installation ne sera permise qu’à la condition qu’un autre praticien cesse son activité. Selon Guillaume Garot, “le principe de liberté d’installation prévaut“ , seuls “13% du territoire“ serait concernés par cette régulation.

Trois articles encore en suspens

Le chemin parlementaire de la proposition de loi est toutefois loin d’être terminé. Trois articles restent à examiner à partir du 6 mai. Ils concernent la suppression de la majoration de tarif en l’absence de médecin traitant, le déploiement d’une première année de médecine sur tous les territoires et le rétablissement de l’obligation de permanence des soins). Enfin, reste aux députés à adopter, ou non en séance, l’ensemble du texte, qui devra poursuivre son cheminement législatif au Sénat.

Un contrefeu ouvert par le gouvernement

Les tenants de la régulation ont pu dans un premier temps, estimer recevoir le soutien indirect du Premier ministre. Lors d’un discours le 1er avril devant le Conseil économique social et environnemental (Cese), le chef du gouvernement s’était en effet prononcé pour une régulation, estimant qu’il fallait “sortir de l’enlisement et de l’impasse » en optant “probablement pour une « régulation. Un mois et demi plus tard : changement de braquet. Présentant le “Pacte de lutte contre les déserts médicaux“ le 25 avril, François Bayrou a ouvert un contrefeu, en promettant de créer une “mission de solidarité obligatoire“. Un dispositif radicalement différent, dont le principe est de demander à “Chaque médecin, généraliste ou spécialiste, qui exerce dans un territoire bien pourvu“, de “consacrer un ou deux jours par mois à des consultations dans les zones qui sont les plus en difficulté“, a indiqué le Premier ministre. Une mesure qui “ne répond pas à l’ampleur du défi, a réagi Guillaume Garot,

 Quel sera l’effet de ce contre-feu gouvernemental ? Pour l’heure, la stratégie de l’exécutif est difficile à prévoir. Des amendements pourraient être introduits pour mettre en musique certaines mesures du pacte, comme le fait savoir l’entourage de M. Bayrou. Dans le même temps, le gouvernement, conformément à son opposition à la régulation, devrait appeler à voter contre l’adoption du texte, in fine.  Au risque de la contradiction avec les membres du gouvernement. Yannick Neuder a en effet fermement marqué son opposition au dispositif, déclarant : “Une pénurie de médecins, même potentiellement régulée, reste une pénurie“. Pour lutter contre les déserts médicaux, le ministre de la Santé a présenté d’autres pistes : favoriser la réussite aux épreuves de vérification des connaissances (EVC) pour les praticiens étrangers ayant obtenu un diplôme hors Union européenne (PADHUE), l’instauration de la quatrième année d’internat de médecine générale ou encore la suppression du numerus apertus.

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