Violation de l’espace aérien de l’UE : réunion des dirigeants européens

Les dirigeants de l’UE se réunissent ce mercredi 1er octobre lors d’un Conseil informel à Copenhague, afin de débattre des moyens de renforcer la défense de l’Europe, à la lumière des récentes violations de l’espace aérien européen par la Russie.

Un sommet informel des chefs d’État et de gouvernement de l’Union Européenne (UE), organisée par la Première ministre danoise, Mette Frederiksen, se tient ce mercredi 1er octobre au château de Christiansborg. A la veille de la réunion de la Communauté politique européenne (CPE), jeudi 2 octobre, les dirigeants européens discuteront de la manière de renforcer la défense de l’Europe, et plus particulièrement, de la réponse à apporter aux actions russes, au regard des violations répétées de l’espace européen par Moscou. Le sommet de Copenhague de mercredi est un pas vers la transformation de l’Union européenne en puissance militaire.

Des incursions russes répétées dans l’espace aérien européen

Depuis le début du mois de septembre 2025, plusieurs incursions russes dans l’espace aérien européen, notamment en Pologne, en Roumanie, en Estonie, au Danemark ou encore en Norvège, ont laissé peser une menace sécuritaire sur le continent. L’Estonie a ainsi dénoncé vendredi 19 septembre une “violation sans précédent“ de son espace aérien par trois avions de combat russe. “La violation aujourd’hui de l’espace aérien estonien par trois avions militaires russes est une nouvelle provocation inacceptable“, a condamné sur X António Costa, le président du Conseil européen, ajoutant : “Elle souligne une fois de plus la nécessité urgente de renforcer notre flanc oriental, d’approfondir la coopération européenne en matière de défense et d’intensifier la pression sur la Russie.“ Il s’agit du troisième pays de l’Otan en moins de deux semaines à faire état d’une incursion russe dans son espace aérien, après la Pologne, dans la nuit du mardi 9 au mercredi 10 septembre, et la Roumanie, dimanche 14 septembre. Ces deux pays avaient fait état, eux, de drones. Des drones de nouveau observés dans la nuit de samedi à dimanche, au-dessus de sites militaires danois dans la nuit pour la deuxième fois consécutive, a indiqué dimanche l’armée danoise.

Ces récentes violations de l’espace aérien européen survenues en l’espace de deux semaines, révèlent une intensification de la pression sécuritaire sur l’Europe. Elles s’inscrivent dans une longue série d’intimidations de la part du Kremlin. Si les origines de certaines d’entre elles ne sont pas encore avérées, ces violations de courtes durées portent leur lot de défis : “Moscou pourrait être en train de tester les limites des capacités de décision, d’action et plus largement de défense des Européens, alors lors que l’Europe semble désunie et affaiblie par le retrait progressif de son allié américain“, déclare Louise Souverbie, chercheuse à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Dans une tribune au “Monde“, le chercheur Nicolas Tenzer considère qu’elles ne visent pas seulement à vérifier les capacités techniques de l’Europe, mais surtout à la déstabiliser. Ne pas répondre à ces tentatives équivaudrait, selon lui, à encourager la stratégie du Kremlin.

La France s’est jointe à d’autres pays européens en envoyant des moyens de lutte anti-drones au Danemark pour sécuriser le sommet de l’UE mercredi et jeudi. “Un détachement interarmées temporaire a été déployé au Danemark. Ce détachement, d’ores et déjà opérationnel, est composé de 35 personnes, d’un hélicoptère Fennec et de moyens actifs pour la lutte antidrones“, selon un communiqué du ministère français des Armées.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky doit intervenir en visioconférence ce mercredi pour partager l’expérience de son pays, qui affronte quotidiennement les drones russes. Kiev propose d’ailleurs de mettre son expertise au service de l’UE.

La nécessité pour l’Europe d’accélérer ses efforts

Ces provocations ont encore démontré la nécessité pour l’UE d’accélérer et d’intensifier ses efforts, afin d’être capable de réagir de manière efficace, autonome et collective aux menaces communes. Il s’agit notamment  d’instaurer des mesures visant à renforcer ses capacités de défense, stimuler le financement de la défense, développer sa base industrielle et créer des possibilités de passation conjointe de marchés, en cohérence avec l’OTAN. “Si nous investissons davantage, nous devons également investir de manière plus efficace et plus rationnelle, y compris au moyen d’outils communs, tels que l’instrument SAFE. Chaque euro dépensé devrait renforcer notre sécurité commune et notre autonomie stratégique“, a déclaré Antonio Costa, le 19 septembre dernier .Reste que les risques sont grands. Si les principes fondamentaux de la défense font l’objet d’un consensus général,  la question du financement oppose les vingt-sept.

À Copenhague, les dirigeants se concentreront sur des mesures concrètes pour atteindre l’objectif de 2030. Les discussions devraient porter en particulier sur :

  • l’obtention de résultats rapides en matière de développement conjoint des capacités ;
  • le soutien au flanc oriental ;
  • la gouvernance, y compris le contrôle et la coordination politiques.

Le résultat des échanges fournira des orientations à la Commission et à la haute représentante pour leur feuille de route sur les étapes à venir en vue de la réalisation de l’objectif de préparation de l’UE en matière de défense. Cette feuille de route sera présentée et examinée lors du Conseil européen des 23 et 24 octobre 2025.

La mise en place d’un mur anti drones

Au coeur des discussions de ce sommet figure notamment l’idée d’un “mur anti-drones“ le long du flanc oriental de l’Union Européenne, relancée le 26 septembre au cours d’une réunion rassemblant dix États membres : Bulgarie, Danemark, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Finlande. “Lors de la réunion d’aujourd’hui, nous avons décidé de passer des discussions à des actions concrètes“, a déclaré le commissaire européen à la Défense,Andrius Kubilius, précisant que ce mur anti-drones aurait un double objectif : la détection et l’intervention, la priorité immédiate étant accordée à la première.

De nombreuses questions restent toutefois en suspens. À commencer par celle du tracé ? Doit-on se limiter aux frontières orientales de l’Union, qui représentent déjà plusieurs milliers de kilomètres, ou étendre la protection plus à l’intérieur, jusqu’au Danemark, par exemple ? Se pose aussi la question du financement, qui n’a pas d’ailleurs pas encore été réellement abordé. Or, la transformation de l’UE en une puissance mondiale efficace a un coût et les gouvernements nationaux ne sont pas tous d’accord sur le montant à dépenser, et encore moins sur le contenu. L’Union européenne ne disposant pas d’armée propre, le projet ne pourra devenir concret qu’à travers un partenariat solide avec l’Otan.

Le versement d’une nouvelle aide à l’Ukraine

Ce sera l’autre gros sujet de ce rendez-vous, qui doit aussi être l’occasion de trouver des sources pérennes de financement pour l’Ukraine au moment où les perspectives de paix semblent s’éloigner et le soutien financier américain se tarit. Ursula von der Leyen voudrait s’appuyer sur les avoirs russes gelés : quelque 210 milliards d’euros de la banque centrale russe auprès d’Euroclear, immobilisés depuis l’invasion russe de l’Ukraine en février 2022. Mais la présidente de la commission européenne risque de trouver le Hongrois Viktor Orbán en travers de sa route. Une échappatoire astucieuse permettrait toutefois selon la cheffe de l’exécutif européen de libérer ces actifs russes en vue d’un “prêt de réparations“ de 140 milliards d’euros pour l’UkraineSelon le plan de la Commission, l’argent russe gelé depuis le début de la guerre serait versé à Kiev sous forme de prêt sans intérêt, l’Ukraine ne le rembourserait qu’une fois que Moscou aurait mis fin à sa guerre et payé les réparation.

 

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