L’Assemblée nationale renouvelle son bureau

Comme tous les ans en début de session parlementaire, l’Assemblée nationale va procéder cette semaine à la nomination de son bureau, la plus haute autorité collégiale du Palais-Bourbon. Une élection particulièrement surveillée cette année, alors que le Rassemblement National pourrait y faire son retour, au détriment de la gauche.

C’est un épisode qui revient chaque année. Avec l’ouverture de la session ordinaire 2025-2026, l’Assemblée nationale va procéder à la nomination de son nouveau bureau, comme le prévoit le règlement du Palais-Bourbon. C’est-à-dire, le renouvellement mercredi 1er octobre et jeudi 2 octobre, de l’ensemble de ses membres, à l’exception de sa présidente, Yaël Braun-Pivet, élue élu pour la durée de la législature (cinq ans), sauf cas de dissolution. Jeudi 2 octobre, les 8 commissions permanentes de l’Assemblée nationale procéderont également au renouvellement de leurs bureaux.

Comme le stipule le règlement de l’Assemblée (article 14), cette instance a tous pouvoirs pour régler les délibérations et pour organiser et diriger tous les services. C’est au Bureau qu’il revient de représenter collégialement l’Assemblée nationale dans les manifestations extérieures, d’interpréter et d’appliquer le Règlement, de régler les incidents de séance majeurs ou encore d’assurer l’équité de traitement au regard de la communication audiovisuelle. Il a aussi le pouvoir de prononcer, ou de suggérer, certaines sanctions disciplinaires à l’encontre de députés.

Quels sont les membres de cette instance ?

Le bureau comprend vingt-deux membres. Outre le ou la président(e) du Palais Bourbon,  six vice-présidents qui président régulièrement des séances et peuvent être amenés remplacer le/la président(e) de l’Assemblée nationale à certaines occasions. Le premier vice-président est traditionnellement issu d’un groupe d’opposition. Autres membres de ce bureau, trois questeurs, dont l’un par usage est un député de l’opposition. Ces questeurs sont en charge des “services financiers et administratifs“ du Palais Bourbon. Le règlement de l’Assemblée prévoit qu’“Aucune dépense nouvelle ne peut être engagée sans leur avis préalable.“ Le bureau est enfin complété par douze secrétaires chargés notamment surveiller des opérations de vote, ou encore dépouiller certains scrutins.

Comment vont-ils être désignés ?

Le lundi 29 septembre à 15 heures, la présidente de l’Assemblée nationale recevra les présidents des groupes parlementaires pour tenter de parvenir à un accord sur la répartition des postes du bureau. Seront autour de la table : Yaël Braun-Pivet, Gabriel Attal (EPR), Marc Fesneau (MoDem), Laurent Marcangeli (Horizons), Laurent Wauquiez (LDR, ex-Les Républicains), Marine Le Pen (RN), Eric Ciotti (À Droite !), Mathilde Panot (LFI), Boris Vallaud (PS), Cyrielle Chatelain (Ecologiste et Social), André Chassaigne (GDR) et Stéphane Lenormand (Liot). Le règlement de l’Assemblée (article 10) préci que la composition de l’instance doit se faire en “s’efforçant de reproduire (…) la configuration politique de l’Assemblée et de respecter la parité entre les femmes et les hommes“.

La répartition des postes à l’amiable, se fait selon un système de points assez complexe prévu par ce même article du règlement. Il est ainsi attribué à chaque poste du Bureau une valeur de : 4 points pour la fonction de Président, 2 points pour celle de vice président, 2,5 points pour celle de questeur et 1 point pour celle de secrétaire. L’ensemble des postes représentant un total de 35,5 points, qui est réparti entre les groupes à la représentation proportionnelle sur la base de leurs effectifs respectifs. “Les présidents des groupes choisissent, en fonction du nombre de points dont ils disposent, les postes qu’ils souhaitent réserver à leur groupe. Cette répartition s’effectue par choix prioritaire en fonction des effectifs respectifs des groupes et, en cas d’égalité de ces effectifs, par voie de tirage au sort“, stipule le règlement.

Aucun accord  obtenu sur la répartition des postes

Sans surprise, les 11 présidents de groupe à l’Assemblée nationale ne sont pas parvenus lundi à un accord sur une liste commune de candidats au renouvellement du bureau, du fait des groupes du Nouveau Front populaire qui s’opposent à l’idée de faire accéder des élus RN aux postes clés de cette instance. Plusieurs scrutins vont donc être organisés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. Un premier pour l’élection des des 6 vice-présidents et des 3 questeurs, qui se tiendra mercredi 1er octobre à partir de 15h. Un second, jeudi 2 octobre à partir de 9h, pour l’élection des douze secrétaires.

Reste à savoir quelle sera la stratégie du “socle commun“ (Ensemble pour la République, MoDem, Horizons et Les Républicains), qui entend reprendre la majorité à la gauche au sein du Bureau. Selon LCP, le socle gouvernemental pourrait se mettre d’accord sur une sorte de “liste bloquée“ basée sur le calcul aux points, comprenant six noms – deux pour les groupes du socle, deux pour le Rassemblement national et deux pour la gauche. “La position du groupe est claire, simple, continue depuis 2017, il faut que chacun puisse être représenté au Bureau“ de l’Assemblée nationale, a déclaré Marc Fesneau (Les Démocrates), mardi 30 septembre.

Vers un retour du RN au bureau de l’Assemblée ?

A l’été 2024, dans la foulée des législatives anticipées provoquées par la dissolution, l’élection des membres du Bureau avait donné lieu à plusieurs coups de théâtre. Le Nouveau Front populaire (NFP) avait d’une part obtenu la majorité des postes au sein du bureau, (13 des 22 membres actuellement). D’autre part, un deal noué entre Gabriel Attal et Laurent Wauquiez avait permis à Ensemble Pour la République (EPR) et la Droite républicaine (DR) de sortir gagnants de la répartition. Grands perdants, le Rassemblement National (RN), mais aussi le MoDem et  l’UDR d’Eric Ciotti s’étaient retrouvés absents du bureau. Mais, un an plus tard, le discours a évolué.

Un éventuel retour du RN au bureau de l’Assemblée nationale cristallise les tensions

Médias 🇫🇷 (@mediasfr.skyfleet.blue) 2025-09-30T09:09:43.876Z

La donne a changé

Les représentants à l’Assemblée du “socle commun“, Gabriel Attal (EPR), Marc Fesneau (Les Démocrates), Paul Christophe (Horizons) et Laurent Wauquiez (Droite républicaine), se sont entendus autour de Yaël Braun-Pivet pour revenir au système à points, comme le veut le règlement de l’Assemblée. Les chefs de partis du “socle commun“ partagent en effet désormais tous, la volonté de la présidente de l’Assemblée nationale de faire en sorte que tous les groupes politiques soient représentés au bureau en proportion de leur taille dans l’hémicycle. Y compris le RN, ce à quoi s’étaient opposés les troupes de Gabriel Attal l’an passé. L’année dernière, lors de la constitution du Bureau sortant, Yaël Braun-Pivet jugeait déjà “sain que chaque groupe politique, quel qu’il soit, puisse être représenté“. Mais à l’époque, le bloc central s’était divisé sur la présence du Rassemblement national et le groupe présidé par Marine Le Pen n’avait pas obtenu de poste. Ce dernier se montre favorable à un retour du système à points et demande deux postes de vice-président, comme en 2022, et quelques secrétaires.

Outre  le fait qu’elle ouvre la voie à l’accession à certains postes importants de députés RN (qui n’en ont aucun), cette entente si elle se confirme devrait aussi entraîner un rééquilibrage : les LR et les macronistes, surreprésentés dans l’instance au regard du nombre de leurs députés, devront faire de la place. Le MoDem, sorti bredouille de la précédente bataille, devrait lui se refaire une santé. La gauche pourrait ressortir comme le grand perdant de cette entente. Elle devrait en effet perdre plusieurs postes au bureau, où elle est aujourd’hui majoritaire. Mais également au niveau des commissions, en particulier celle des Affaires économiques, présidée aujourd’hui par l’Insoumise Aurélie Trouvé, que le socle commun veut récupérer.

Le deal

La présidente de l’Assemblée propose à ses interlocuteurs d’accorder deux vice-présidences à chacun des trois blocs : deux au RN, deux au socle commun et deux à la gauche.“Les « onze groupes politiques doivent être représentés au bureau de l’Assemblée nationale“, a t-elle réaffirmé mercredi matin sur BFMTV.  Selon plusieurs sources parlementaires, cette répartition conviendrait aux lepénistes, aux macronistes et à la droite, mais pas aux groupes du NFP qui sans surprise, l’ont refusée. Yaël Braun-Pivet souhaiterait aussi que soit accordé un poste de secrétaire à chacun des onze groupes politiques, le RN réclamant le douzième. En revanche, un consensus s’est dessiné pour ne pas modifier la composition de la questure, qui fonctionne correctement du point de vue des macronistes comme du RN, qui n’y a pourtant aucun poste.

 

Alors qu’il avait fait part de son souhait de rester vice-président, Roland Lescure (EPR) a finalement décidé mardi de lâcher l’affaire hier, ouvrant la voie à “un déblocage des discussions au sein du socle commun“ selon son entourage. Concrètement : le MoDem pourra récupérer la deuxième vice-présidence dévolue au bloc centre et droite — la première étant celle occupée par la députée Horizons Naïma Moutchou. Comme précédemment indiqué, pas de changement concernant les trois questures. Sauf retournement de situation, elles demeureront entre les mains de Brigitte Klinkert (EPR, ex-Renaissance), Michèle Tabarot (LR) et Christine Pirès Beaune (PS). Selon le deal conclu mardi, Ensemble Pour la République (EPR), déjà présent au bureau avec la présidente de la Chambre Yaël Braun-Pivet et la questeure Brigitte Klinkert, conservera un troisième siège en obtenant un poste de secrétaire — chacun des onze groupes en aura un, le douzième devant en principe revenir au groupe le plus nombreux, soit le Rassemblement national.

 

 

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