Présidentielle en Roumanie : un deuxième tour sous tension

Grand vainqueur du premier tour, avec 40,9% des voix, le candidat du parti nationaliste AUR, George Simion, va tenter de transformer l’essai ce dimanche 18 mai. Il affrontera lors du second tour le maire de Bucarest, Nicușor Dan. Et sa victoire est loin d’être acquise.

C’est un pari gagné haut la main, au-delà de toutes les prévisions. Lors du premier tour de la présidentielle, George Simion, chef du parti de droite souverainiste Alliance pour l’unité des Roumains (AUR), a obtenu “un score écrasant“, avec 40,9% des suffrages. Le candidat de l’extrême droite, proche de Giorgia Meloni et de l’idéologie MAGA, a confirmé la poussée nationaliste dans ce pays frontalier de l’Ukraine.

Présidentielle en Roumanie : George Simion, candidat de l’extrême droite, obtient un score écrasant au premier tour

Le Monde (@lemonde.fr) 2025-05-05T03:33:11.299904+00:00

Le Trump roumain face au réformateur pro européen

Lors du second tour ce dimanche, cet ultranationaliste, qui s’oppose à l’aide militaire à l’Ukraine, et “se rêve en président MAGA (Make America Great Again)“, défiera le maire centriste pro-européen de Bucarest Nicușor Dan (20,9 %), qui a dépassé de peu le candidat unique des partis au pouvoir, Crin Antonescu (20,07 %). Et tout oppose les deux hommes.

George Simion, 38 ans, déjà candidat lors du scrutin du 24 novembre annulé sur fond de soupçons d’ingérence russe, s’était fait voler la vedette par l’inattendu Calin Georgescu, recueillant moins de 14% des voix. Sans jamais obtenir le soutien explicite de Georgescu, Simion s’est positionné en soutien de ce dernier, et en porte-voix de ses électeurs en colère contre ce qu’ils estiment être une élection truquée. Le fondateur du parti AUR qui a émergé sur la scène politique en défendant des positions radicales contre les restrictions anti-Covid, coche toutes les cases du parfait populiste : jamais avare d’un commentaire puant sur TikTok, ultraconservateur et longtemps meneur d’un groupe de hooligans au stade de Bucarest… Ce politicien de carrière manie aussi avec brio le complotisme. Admirateur de Donald Trump, dont il a assisté à l’investiture, il se dit aligné sur le mouvement “Make America Great Again“ (MAGA) et se rêve en président MAGA.

Brillant mathématicien francophone, ancien élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, Nicușor Dan, 55 ans, a décidé après “le choc“ de l’annulation du scrutin en novembre de se lancer en indépendant dans l’arène, en espérant pouvoir incarner le renouveau pro-européen. Le maire libéral de Bucarest présente un programme axé sur la modernisation de la Roumanie, tout en consolidant son ancrage occidental. Sur le plan interne, il met en avant la continuité de son combat anti-corruption et la réforme de l’État. Il prône la transparence institutionnelle et le renforcement de l’État de droit, souhaitant étendre à l’échelle nationale les principes de bonne gouvernance appliqués à Bucarest. Sous le slogan “Une Roumanie honnête“, Nicusor Dan se veut l’homme du “changement“, sauf dans le soutien à l’Ukraine et l’engagement occidental.

Des visions diamétralement opposées sur l’Ukraine

Trois jours après le premier tour de l’élection présidentielle, les deux candidats se sont retrouvés, jeudi 8 mai, pour un débat de trois heures. L’invasion russe a été l’un des principaux sujets abordés lors de ce débat de l’entre-deux-tours, sur lequel les deux candidats ont exprimés des positions très différentes, même si tous les deux condamnent l’invasion massive de l’Ukraine par Poutine.

Un second tour sous tension

Nicusor Dan peut-il faire le poids face au nationaliste George Simion ? Tout dépendra en fait de sa capacité à rallier les voix des autres partis. Doté de seulement 21 % des voix, l’europhile maire centriste indépendant de Bucarest, doit à présent rallier les partis traditionnels et leurs électeurs à sa cause, après les avoir taxés d’immobilisme. Il peine à ce titre à rallier un soutien franc des libéraux et sociaux-démocrates, dont il a souvent pointé la corruption rampante. Pour arracher la victoire, il lui faudra aussi convaincre tous ceux qui ne sont pas allés voter, d’aller aux urnes : soit près d’un électeur roumain sur deux.

Le candidat d’extrême droite possède quant à lui une large avance. Mais même fort de 40% des votes au premier tour, le second tour est incertain. Sa marge de manoeuvre s’avère aussi ténue. Le chef du parti AUR a notamment déjà capté les voix de son ex-adversaire d’extrême-droite, Calin Georgescu, empêché de se présenter après l’annulation du scrutin par la Cour constitutionnelle, en décembre dernier. George Simion n’est pas du tout assuré d’obtenir la majorité. Il “sera probablement battu,“ car il dispose de peu de réserves de voix, a commenté le professeur de sciences politiques Sergiu Mişcoiu, dans Les Echos. Pour l’heure, un premier sondage  après le premier tour de scrutin, crédite le nationaliste George Simion de près de 55% des voix contre son adversaire mondialiste Nicușor Dan. Selon les observateurs, une victoire de George Simion lors du second tour prévu le 18 mai pourrait isoler le pays, freiner l’investissement privé et déstabiliser le flanc oriental de l’Otan, où l’Ukraine est en guerre contre la Russie.

 

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