N’ayant plus aucune indulgence à l’égard du Premier ministre, le groupe Socialiste a déposé une motion de censure contre François Bayrou et son gouvernement. Même si cette dernière a peu de chances d’être adoptée lors de son examen mardi, à défaut des voix du RN, elle relance la menace “fantôme“ de la dissolution.
Le groupe « Socialistes et apparentés“ à l’Assemblée nationale n’a pas attendu de possibles explications. Avant même la conférence de presse du Premier ministre sur les retraites, les députés du parti à la rose, ont dégainé le 26 juin une motion de censure contre François François Bayrou et son gouvernement.
Le Premier ministre s'était engagé à donner le dernier mot au Parlement sur les retraites et à débattre de tout, y compris de la mesure d’âge.
Il a trahi sa parole.
Les 66 député·es Socialistes et apparentés demandent la censure du Gouvernement.
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— Députés Socialistes et apparentés (@socialistesAN) June 26, 2025
Dès le 24 juin, le président du groupe à l’Assemblée, Boris Vallaud, avait indiqué : “Le respect de la parole donnée est à la base même de notre régime démocratique“. “Vous avez pris des engagements sur ce sujet, pas tenus sur ce sujet comme sur bien d’autres. Cela nous contraints M. le Premier ministre à déposer une motion de censure contre votre gouvernement.«
"Le respect de la parole donnée est à la base même de notre régime démocratique" : @BorisVallaud, président du groupe @socialistesAN, annonce le dépôt d'une motion de censure socialiste contre le gouvernement Bayrou. #Retraites #DirectAN pic.twitter.com/UsYvI0cNJH
— LCP (@LCP) June 24, 2025
Signée par les 66 membres du groupe (y compris par François Hollande, qui n’avait pas caché ses réticences), cette motion vient censurer la méthode de François Bayrou lors des négociations entre partenaires sociaux sur les retraites. Plus précisément, les Socialistes reprochent au chef du gouvernement, d’avoir refusé de déposer un projet de loi sur les retraites permettant au Parlement de “débattre de tout“, y compris du retour à un âge de départ fixé à 62 ans. Les annonces du Premier ministre n’y ont rien changé. Les annonces de Matignon “ne contrarient en rien notre souhait de le censurer“, a réagi à l’Assemblée nationale Arthur Delaporte, porte-parole du groupe PS, qui a dénoncé au passage une “tentative d’enfumage“, du Premier ministre.
Des mots de François Bayrou, cette motion de censure déposée “est une blague“ : le chef du gouvernement a affirmé ce dimanche que le parti de gauche a déposé ce texte de rejet, uniquement pour “montrer qu’il est dans l’opposition.“ “Le PS a été un très grand parti politique français, il a eu la responsabilité du pouvoir, mais il arrive à des errements que ses propres membres dénoncent“, a déploré le Premier ministre, invité du Grand Jury sur RTL.
🔴🗣️"C'est une blague !"
Le Premier ministre François @bayrou réagit à la motion de censure du PS dans #LeGrandJury @publicsenat @Le_Figaro @m6info. pic.twitter.com/9244GT32Gd
— RTL France (@RTLFrance) June 29, 2025
LFI votera la motion de censure des Socialistes
Insoumis, Écologistes, communistes et socialistes : en vingt-quatre heures, toutes les formations de gauche ont annoncé vouloir censurer le gouvernement. Mais en déposant leur propre texte, les socialistes ont clairement acté le fait qu’ils refusent de se joindre à l’initiative commune des Verts, du Parti communiste et de LFI, qui ambitionnaient de ne déposer qu’une seule motion de censure pour tout le Nouveau Front populaire. “Nous regrettons le sectarisme qui a conduit le Parti socialiste à refuser une censure commune de toute la gauche“, a immédiatement réagi La France insoumise. “Face à cette situation, nous refusons d’ajouter le ridicule au sectarisme. […] C’est pourquoi nous voterons cette motion de censure avec l’objectif de faire tomber le gouvernement “, annonce le communiqué de LFI.
Tous ceux qui ne voteront pas la #MotionDeCensure seront complices de la Macronie et de la retraite à 64 ans
Communiqué du groupe @FiAssemblee ⤵️ pic.twitter.com/TCbb4HeOUD
— Mathilde Panot (@MathildePanot) June 26, 2025
Le RN en position d’arbitre
Mais la clé de la censure du gouvernement Bayrou ne se situe pas chez les socialistes, mais au Rassemblement national. Une fois de plus, c’est entre les mains du RN que se trouve le dénouement de cette motion de censure. Or ce dernier a fait savoir qu’il ne censurerait pas sur les retraites, renvoyant la question au prochain budget. Le parti à la flamme refusant officiellement de faire du dossier des retraites une “ligne rouge“, la perspective d’une censure du Premier ministre semble peu probable, même si le parti est coutumier des revirements de dernière minute.
Retraites : le RN de moins en moins tenté par la censure https://t.co/8W4UF5swmn
— Les Echos (@LesEchos) June 23, 2025
La “menace fantôme“ de la dissolution
Les socialistes, conciliants lors du vote sur les finances de la France l’hiver dernier, entendent cette fois durcir le ton. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a prévenu dimanche sur LCI qu’il n’accordera “plus aucune indulgence“ au gouvernement. “Nous poserons d’entrée de jeu les sujets sur lesquels nous ne négocierons pas davantage […] ; s’ils ne bougent pas, nous ne bougerons pas“ a prévenu le patron du parti, estimant ne plus pouvoir donner “la même confiance“, les socialistes ayant été “trahis“. “Nous souhaitons que François Bayrou ne soit plus Premier ministre et qu’il y ait un véritable changement, que nous trouvions un interlocuteur à Matignon“, a déclaré le chef des socialistes.
🔴 Olivier Faure (@faureolivier), invité de @mchantrait
🗣️ Motion de censure : "Plus aucune indulgence à l'égard de François Bayrou (…) On nous a trahi." pic.twitter.com/4sj9TIs0ZK
— LCI (@LCI) June 29, 2025
Il n’en fallait pas plus pour que le mot “dissolution“ fasse son grand retour, au moment où Emmanuel Macron s’apprête à retrouver ce pouvoir. Ainsi Marine Le Pen a-t-elle jugé hier que le chef de l’Etat pouvait “être tenté de dissoudre face au délitement” du “socle commun“. Face à ses troupes réunies en convention avec celles de son allié Eric Ciotti, la présidente des députés RN les a enjoint de se préparer à cette éventualité. Edouard Philippe a lui aussi alerté mardi le bureau politique d’Horizons, sur le risque d’une nouvelle dissolution. Le même jour devant les députés socialistes, François Hollande faisait le même pari d’élections anticipées, si François Bayrou tombait.
💬"Il serait dangereux de se convaincre qu’il n’y aura pas de dissolution. […] S’il y a une dissolution, nous devons l’emporter"
Marine Le Pen lors de la convention nationale du Rassemblement national et de l’UDR#BFM2 pic.twitter.com/5yaZawVsYO— BFMTV (@BFMTV) June 28, 2025