À l’issue d’une dernière réunion infructueuse, le mardi 17 juin, les partenaires sociaux engagés dans le conclave sur les retraites ont convenu d’une ultime rencontre le lundi 23 juin. Mais la perspective d’un accord s’éloigne, tant les désaccords sont forts entre les cinq organisations restées autour de la table.
Après trois mois et demi de concertation, syndicats et patronats doivent se retrouver pour une ultime séance du conclave retraite, ce lundi 23 juin à 15 heures. Réunies le 17 juin pour ce qui devait être la dernière séance de négociation, les cinq organisations toujours autour de la table (CFE-CGC, CFDT, CFTC, MEDEF, CPME), n’ont pas abouti à un accord. Faute de “fumée blanche“, les partenaires sociaux ont décidé de se donner une dernière chance et annoncé vers minuit un ultime round, ce lundi 23 juin.
Retraites : toujours pas de fumée blanche, le "conclave" prolongé jusqu'au 23 juin
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Qui autour de la table ?
Six mois plus tard, que reste-t-il du conclave sur les retraites ? Pour l’heure, pas grand-chose : à commencer par les partenaires sociaux invités à négocier. Force Ouvrière (FO) a claqué la porte dès la première réunion le 27 février, la CGT et l’U2P (patronat pour les artisans) ont quitté le navire mi-mars. Ne restent donc plus que cinq confédérations : la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC côté syndicats, et le Medef et la CPME côté patronat. Mardi 17 juin, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) a annoncé qu’elle serait présente. La CFDT et la CFE-CGC ont fait de même mercredi 18 juin.
#Retraites : " La CFDT sera au rendez-vous lundi" et souhaite "concrétiser" des accords sur la carrière des femmes ou la prise en compte de la pénibilité de certains métier, a déclaré sa secrétaire générale @MaryliseLeon https://t.co/vQArUHy07J pic.twitter.com/ysyZ24eHYs
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Chez les organisations patronales, si la CPME a confirmé sa présence, l’équation est plus compliquée du côté du Medef. Après s’être dit “très réservé“ sur la présence de son organisation, Patrice Martin (Medef), laisse encore planer le doute sur sa présence. Officiellement, l’arbitrage final sera pris à l’occasion d’un bureau exécutif, prévu au siège de l’organisation, lundi à 10 heures, assure le Medef. Mais d’après les informations de la Tribune, le patronat se rendra bien au conclave. “On ne va pas faire la politique de la chaise vide ! Nous sommes une organisation responsable. Ne pas y aller lundi serait endosser l’échec du conclave“, confie un membre du Medef. Et le patronat ne devrait pas venir les mains vides. Mais avec une ultime proposition d’accord qu’il mettra sur la table. “Si le patronat ne vient pas le 23, on saura qui a mis fin aux négociations et ce ne sera pas nous !“, a commenté auprès de l’Agence France-Presse Cyril Chabanier, président de la CFTC.
Les points de blocage
Au fur et à mesure, le contenu même d’un éventuel accord se réduit comme peau de chagrin. Les syndicats ont certes concédé le maintien de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, mais moyennant des contreparties. Et sur ce point, les désaccords sont encore forts entre les cinq organisations restées autour de la table.
Négociations sur les retraites : les syndicats réformistes prêts à une concession majeure sur l’âge légal de départ
Selon Yvan Ricordeau, le numéro deux de la CFDT, deux points cristallisent les tensions : celui de l’âge à partir duquel les assurés ont droit à une pension à taux plein, même s’ils n’ont pas le nombre de trimestres requis. Les partenaires sociaux ne parviennent é pas à s’entendre sur la question du traitement des métiers pénibles.
Conclave sur les retraites : pas de miracle https://t.co/IvsWdsx02I
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L’âge d’annulation de la décote
Parmi les “points durs“, la CFTC a posé comme “ligne rouge“, le passage à 66 ans de l’âge de départ sans décote, contre 67 ans actuellement. Montant de la facture : entre 1,2 et 1,5 milliard d’euros en 2030, 5,5 milliards en 2035. Trop cher, répondent le Medef comme la CPME. Une nouvelle hypothèse a surgi en fin de négociation le 17 juin : couper la poire en deux pour atterrir à 66 ans et demi. “Ce n’est pas correct et pas du tout à la hauteur de six mois de négociation“, a balayé Pascale Coton de la CFTC.
La pénibilité
C’est, depuis le début, le cheval de bataille de la CFDT : réintégrer trois risques dits “ergonomiques“ dans le compte de prévention pénibilité (C2P). La confédération souhaite que les salariés devant porter des charges lourdes, subir des postures pénibles ou des vibrations mécaniques accumulent des points pour accéder à des dispositifs de formation, reconversion, temps partiels, mais aussi bénéficient de départs anticipés à la retraite. Si le Medef est prêt à élargir le compte professionnel de prévention à ces trois facteurs de risques supplémentaires, il est opposé à l’idée de permettre aux salariés concernés de partir à la retraite plus tôt que les autres.
"Conclave" sur les retraites : "Le syndicat qui pèse le plus dans la négociation, c'est la CFDT. Et pour la CFDT, le plus important, c'est la pénibilité", estime @fannyguinochet, journaliste économique. "C'est sur point qu'il y a des tensions." #CVR pic.twitter.com/ftLYF9IjsN
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Le financement en question
C’est à n’en pas douter le point crucial. Comment en effet financer les mesures qui seraient issues de ces négociations. Là encore, quand bien même l’ampleur de CES mesures serait revue à la baisse, ça bloque. L’atteinte de l’objectif d’un retour à l’équilibre du régime d’ici 2030 exigé par Matignon semble loin. Les syndicats réclament un effort du patronat : augmenter les cotisations, ou encore le forfait social de deux points. Une mesure chiffrée a quelque 400 millions d’euros. Ce dernier s’y refuse et préfère mettre en avant une autre mesure d’économies évoquée : la sous-indexation de 0,8 point des pensions, qui rapporterait 2 milliards d’euros en 2026. Reste au parlement à voter une telle mesure. “Désindexer les pensions de retraite ou augmenter la CSG pour les retraités ne relève pas de notre responsabilité. C’est le Parlement, à ce jour, qui décide“, a avancé au micro des 4 Vérités sur France 2, Patrice Martin mercredi 18 juin, soulignant avoir “un gros doute quant à la faisabilité de ce passage de balle à l’Assemblée“. Le patron du Medef a également déclaré refuser “catégoriquement“ la hausse des cotisations patronales, défendant “un principe de cohérence“.
“Nous refusons catégoriquement la hausse des cotisations patronales et je m’étonne que certains aient mis sur la table des mesures qui créent de la complexité et qui renchérissent le coût du travail. On a 80 milliards de déficit commercial chaque année. Tous les autres pays européens, dorénavant, sont en excédent commercial. On est rentré dans une guerre commerciale mondiale infernale. Ça ne nous a pas échappé avec les États-Unis, avec la Chine, avec d’autres. Et on voudrait, au même moment, dégrader la compétitivité française. Il y a un principe de cohérence. L’économie est une science exacte. On ne joue pas avec l’économie. On ne joue pas avec les entreprises.“
🗣️ "Je m'étonne que certains aient mis sur la table des mesures qui renchérissent le coût du travail."
🔴 @PatrickMartin_1, président du @medef, refuse "catégoriquement" la hausse des cotisations patronales et défend "un principe de cohérence". #Telematin pic.twitter.com/GYZL8aoC1s
— Telematin (@telematin) June 18, 2025
Les conclusions du conclave détermineront les stratégies des groupes d’opposition à propos du dépôt et/ou du soutien à une motion de censure du gouvernement. L’Insoumis Manuel Bompard a prévenu que, sans abrogation de la réforme Borne, il y aurait dépôt d’une telle motion dans la semaine. Mais celle-ci ne devrait pas parvenir à son but, le Rassemblement national, par la voix de Jean-Philippe Tanguy, ayant prévenu hier que la question des retraites n’était pas une “ligne rouge” pour les siens (contrairement au budget et à la politique énergétique). Quant au groupe socialiste, bien malin celui qui nous résumera sa position.