Examen à l’Assemblée du projet de loi sur le partage de la valeur

Quand :
26/06/2023 – 29/06/2023 Jour entier
2023-06-26T00:00:00+02:00
2023-06-30T00:00:00+02:00
Où :
Assemblée nationale
126 Rue de l'Université
75007 Paris
France

Le projet de loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel (ANI) relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise, arrive dans l’hémicycle ce lundi après-midi.

Ce que contient le texte

On l’a dit, le texte transpose certaines des mesures de  l’accord interprofessionnel, signé en février dernier entre les représentants des employeurs et des salariés, visant à une meilleure répartition des résultats au profit des salariés. Le projet de loi entend ainsi notamment rendre obligatoire la mise en place d’un dispositif de partage de la valeur – en généralisant les trois dispositifs existants: l’intéressement, la participation et les primes ponctuelles – dans les entreprises de 11 à 49 salariés. Il vise aussi à faciliter l’usage de la prime Macron dans les entreprises en leur permettant de l’octroyer jusqu’à deux fois par an. Et également à développer l’actionnariat salarié.

Cinq ans pour tester deux nouveaux dispositifs

Dans le détail, pendant une période de 5 ans, le projet de loi prévoit de lancer deux expérimentations visant les entreprises de moins de 50 salariés. Elles prévoient de :

  • faciliter la mise en place de la participation par l’autorisation d’une formule dérogatoire moins favorable que la formule légale. D’ici le 30 juin 2024, les branches professionnelles devront ouvrir une négociation en ce sens .
  • obliger la mise en place d’un dispositif de partage de la valeur dans les entreprises employant entre 11 et 49 salariés. Seraient concernées les entreprises dont le bénéfice net fiscal serait au moins égal à 10 % du chiffre d’affaires pendant 3 exercices consécutifs. L’année suivant ce constat, il sera alors offert trois possibilités à ces employeurs : mettre en place un accord de participation, abonder un plan d’épargne salariale (PEE, PEI, PERCO ou PERECO) ou verser une prime de partage de la valeur (la PPV).

Cette obligation, qui n’incomberait pas aux employeurs disposant déjà d’un dispositif, devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2025. Seraient donc pris en compte, les exercices clos depuis 2022.

Le versement de la prime de partage de la valeur, facilité

Outre ces deux expérimentations, le projet de loi propose quelques ajustements concernant la prime de partage de la valeur. Le premier concerne la possibilité  d’attribuer cette prime deux fois par an, dès lors que sont respectés les plafonds annuels pour l’exonération des charges sociales et fiscales (3000 ou 6000 euros). Le deuxième permettrait de placer cette prime directement sur un plan d’épargne entreprise, sans passer par la case bulletin de paie. Et enfin troisième changement, et non des moindres : la prolongation du régime fiscal allégé qui devait prendre fin le 31 décembre 2023.

Une obligation de négocier sur les bénéfices exceptionnels

Elle concernera les entreprises de 50 salariés et plus qui disposent d’un ou plusieurs délégués syndicaux, lorsqu’elle ouvrent une négociation sur un dispositif de participation ou d’intéressement. La prise en compte des bénéfices pourra conduire à un supplément d’intéressement ou de participation ou à une nouvelle discussion sur un dispositif de partage. Les entreprises déjà couvertes par un accord d’intéressement ou de participation, au moment de la publication de la loi, devront engager une négociation d’ici le 30 juin 2024 pour définir ce qu’est un bénéfice exceptionnel et comment il sera partagé avec les salariés.

Le texte prévoit également une ouverture plus grande de portion du capital aux salariés actionnaires. Les plafonds d’attribution des actions gratuites sont rehaussés.

Des dispositions pour une épargne verte, solidaire, responsable

Le projet de loi est enfin complété par des dispositions visant à promouvoir une épargne verte, solidaire et responsable. Les règlements des plans d’épargne entreprise (PEE) et des plans d’épargne retraite (PER) devront ainsi proposer un fond satisfaisant à des critères de financement de la transition énergétique et écologique ou d’investissement socialement responsable, en complément du fonds solidaire qui doit déjà être proposé dans ces plans. Les épargnants salariés pourront ainsi choisir d’affecter par exemple leur prime de participation ou d’intéressement à des fonds labellisés ISR, Greenfin ou CIES.

Un risque de “contournement du salaire“ pour la gauche et le RN

L’accord a été signé par quatre syndicats sur cinq – sans la CGT – et se situe “dans la lignée des réformes depuis 2017 pour revaloriser le travail“, vante le ministre de tutelle, Olivier Dussopt, qui plaide pour que “l’équilibre du texte soit conservé“, pressant les députés de se tenir à “l’accord, rien que l’accord“. La Première ministre Élisabeth Borne, qui cherche à renouer le dialogue social après le long conflit des retraites, se félicite pour sa part : “ce projet de loi illustre ce qu’on souhaite faire avec les partenaires sociaux, c’est-à-dire leur laisser prendre la main“ puis traduire les accords dans la loi.

Pour autant, les parlementaires entendent prendre pleinement leur part, et ont déposé quelque 380 amendements au projet de loi, à l’examen jusqu’à jeudi. Alors que les députés Les Républicains (LR) soutiennent les dispositifs de “partage de la valeur“ vus comme un “complément de rémunération et de challenge pour les salariés“, les autres oppositions sont plus dubitatives, voire franchement opposées.

La gauche pointe ainsi le risque de “contournement du salaire“ et accuse le gouvernement de “ne répondre en rien à la question du pouvoir d’achat“. “C’est très en deçà de ce qui doit être fait. Le gouvernement essaye de nous faire croire que, désormais, il fait du partage des richesses une priorité. Il aurait dû aller beaucoup plus loin“, regrette notamment la patronne du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain. Les élus LFI vont pour leur part chercher à supprimer ce qu’ils perçoivent comme des “écrans de fumée“ pour tromper les salariés, l’ensemble de la Nupes poussant pour des mesures d’égalité salariale ou de “justice sociale“. Le Rassemblement national craint quant à lui que le déploiement de ces dispositifs ne se fasse “au détriment de l’augmentation des salaires, qui reste le meilleur partage de la valeur“. Les débats promettent notamment d’être animés autour de la question des “bénéfices exceptionnels“.

Dans le camp présidentiel, on ne cache pas ses craintes que le projet de loi soit “dénaturé“ au cours des discussions en séance publique. “Chez LFI et même peut-être dans nos propres rangs, certains vont vouloir faire de la surenchère“, redoute par exemple le député Renaissance Éric Bothorel.

 

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