126 Rue de l'Université
75007 Paris
France
Le gouvernement soumet ce lundi en 1ère lecture aux députés, son projet de loi de sortie de la crise sanitaire. L’idée est de mettre en musique les mesures et le calendrier du déconfinement annoncés par le chef de l’Etat fin avril.
“La perspective d’un retour progressif à une vie plus normale doit nous amener à revoir nos outils juridiques et à les adapter à une situation qui, à compter du mois de juin prochain, ne sera plus celle de l’état d’urgence sanitaire, mais devra nous permettre de répondre à ce que j’appellerais un devoir de vigilance sanitaire“, avait indiqué Jean Castex le 28 avril dernier, lors de l’adoption du texte par le Conseil des ministres. Toutefois, le ministre de la Santé, Olivier Véran, met en garde : le texte “n’est pas un point de bascule, il ne marque pas une rupture nette entre les contraintes liées à l’épidémie et le retour de la vie d’avant“.
C’est la deuxième fois en un an que le gouvernement présente un régime transitoire de sortie de l’état de l’urgence. Au début de l’été 2020, députés et sénateurs avaient voté un texte dont les bases sont similaires à celui qui sera examiné dans l’hémicycle du Palais Bourbon, puis au Sénat le 18 mai.
Des pouvoirs exorbitants pendant 5 mois
Dans les faits, les onze articles qui composent le texte après son passage en commission, vont continuer de conférer au gouvernement du 2 juin au 31 octobre, des pouvoirs de police sanitaire jugés exorbitants par les oppositions et certains défenseurs des libertés publiques. L’exécutif garde en effet la plupart des pouvoirs déjà prévus par ce régime exceptionnel. Concrètement, pendant cinq mois, le Premier ministre aura la compétence de prendre des mesures “par décret […] dans l’intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de Covid-19“ précise l’avant-projet de loi.
L'exécutif présente ce matin en conseil des ministres son PJL d'urgence sanitaire qui lui permet de garder la plupart de ses pouvoirs exceptionnels jusqu'au 31 octobre, avec de possible mesures localisées, sous conditions. Ce que prévoit le texte https://t.co/GdSWDFLhpc pic.twitter.com/PUzZaykZul
— L'Echiquier social (@EchiquierSocial) April 28, 2021
Un état d’urgence “Canada dry“
Après son passage en commission des Lois à l’Assemblée, le gouvernement s’est donné les moyens de maintenir des couvre-feux et a musclé son projet de “pass sanitaire“. C’est “un peu comme le Canada dry, ça s’apparente à une sortie qui n’en est pas une“, commente à ce titre le député LR Philippe Gosselin. Dans les faits, l’exécutif conserve ainsi la possibilité de prendre des mesures de couvre-feu jusqu’au 30 juin 2021 inclus, au sein d’une plage horaire comprise entre 21 heures et 6 heures maximum. Le Premier ministre garde également la possibilité d’imposer, en cas de reprise épidémique, des confinements locaux dans des territoires qui peuvent rassembler jusqu’à 10% de la population française.
Le “pass sanitaire“ musclé
Après son passage en commission des Lois à l’Assemblée, le gouvernement a également musclé son projet de “pass sanitaire“. L’outil d’abord réservé aux déplacements vers ou depuis l’étranger pourrait également subordonner à trois conditions l’accès à des grands rassemblements ou lieux réunissant plus de 1.000 personnes. Pour participer à un festival par exemple, un mélomane pourrait devoir présenter le résultat négatif d’un dépistage virologique, un justificatif de vaccination ou attestant de son rétablissement à la suite d’une contamination. En commission, les députés ont voulu également encadrer davantage la mesure en excluant explicitement les activités du quotidien: restaurants, cinémas, théâtre, etc. “C’est une ligne rouge“, confirme le rapporteur LREM du texte, le député et médecin Jean-Pierre Pont.
#Covid19france #déconfinement
Les députés de la commission des Lois se sont prononcés hier soir en faveur de l'instauration d'un « #PassSanitaire » pour l'accès à des grands rassemblements
Mais le texte a suscité de vifs débatshttps://t.co/MveZaq8YeD— Valérie Mazuir (@EchosPolitique) May 5, 2021
Malgré les assurances gouvernementales, le dispositif fait tiquer jusque dans les rangs de la majorité. “Ça ressemble à une discrimination, pour moi, c’est un précédent“, a mis en avant le député de Paris, Pacôme Rupin. “Le texte n’est pas clair“, a grincé le Modem Philippe Latombe. “On ne fait pas de distinguo entre rassemblements intérieurs ou extérieurs“, a souligné le LR Philippe Gosselin. “Et quid des pèlerinages?“ «Il n’y aura pas de limite dans la discrimination», a prédit le LFI Eric Coquerel pour qui tel ou tel restaurateur voudra exiger le “pass sanitaire“, pour subordonner l’accès à son établissement.
🚨 COVID : Nous allons passer de l'Etat d'Urgence à l'Etat d'Exception !
On nous dit que le Pass Sanitaire va servir à autre chose que voyager, comme les activités sociales.. La contrainte, toujours, mais rien n’est fait pour ceux qui n’ont pas les moyens de respecter les règles pic.twitter.com/4C6yWuqxbP
— Eric Coquerel (@ericcoquerel) May 4, 2021
L’examen en séance ce lundi devrait donc permettre d’affiner encore la mesure, notamment sur les lieux et les rassemblements concernés. “1000 personnes sur cinq hectares, ce n’est pas la même chose que 1000 personnes sur 500 m2“ fait valoir Jean-Pierre Pont.